Posté le :04/05/2023
Formule Renault 2.0 2013-2018, 210ch pour 600kg, c'est vraiment un expérience en soi. Ca bien 4 roues, un volant, 3 pédales et un moteur central arrière mais rien à voir avec un auto de route aussi coursifiée soit-elle.
Le stage suit le déroulement classique d'un stage de pilotage avec présentation/briefing/sécurité. Le petit plus vient déjà de l'habillement avec combinaison + bottines obligatoires. Le briefing est classique et j'essaie de mémoriser le maximum de choses sachant que je vais avoir 5 tours sur une machine inconnue, avec des perfs inconnues mais sur un circuit que je connais heureusement un peu pour avoir serré le moteur de ancien Boxster dessus (cf supra). Points de freinages matérialisés par 3 cônes (à 150m pour la freinage le plus appuyé à environ 200km/h en 7), rétrogradage aux 2 cônes jusqu'en 3 (pas de protection de sur-régime, chèque de caution qui fait peur), points de braquages et de cordes avec 1 cône. Tous les virage se passent en 3. Accélération uniquement roues droites au dernier cône simple de virage. Freinage à faire de manière énergique.
Avant l'installation, c'est la finalisation de l'équipement : cagoule, gants, casque et HANS. CA Y EST ! JE SUIS UN VRAI PILOTE !!! Installation relativement facile, le mécanicien explique bien les choses : 3 pédales classiques, volant avec palettes, embrayage uniquement pour départ et arrêt. Les pédales ont effectivement des courses assez courtes surtout l'embrayage, pas grave il ne servira que 2 fois. Une fois installé, le mécano me sangle, fort, très fort en fait juste pas trop fort pour me permettre de respirer, un peu, faut pas déconner quand même. A ce moment le pilote du moment ne forme qu'un avec la voiture. Un autre truc me surprend : le baquet serre les bien cuisses, les 2 jambes sont bien parallèles. L'espace au pied est occupé par les pédales, pas de repose pieds. Les pédales, au toucher, me semblent larges avec un grip qui accroche bien la semelle de chaussure. Vient le moment de poser l'appui-tête. Ce petit "accessoire" change complètement la perception de la situation. Très clairement mes mouvements sont très limités, à part les mouvements du volant je ne peut pas faire grand choses d'autres. Sortir les bras hors du cockpit : niet, tourner la tête : niet, baisser la tête : niet. Par contre j'ai toute la place que je veux aux coudes. Après cette adaptation je regarde autour de moi :
- Devant je vois le museau de la voiture qui cache presque la piste
- Entre le museau et les rétros/roues, je vois très bien l'enrobé
- Au niveau des roues, je ne vois pas grand chose : la roue forcément, sans voir où est posée la roue et le rétro cache la vue au-dessus de cette dernière
- Les rétros en eux-mêmes sont petits mais je prends quand même le temps de les faire par le mécano
- J'ai du mal à voir l'écran du volant car je dois être un peu bas mais j'arrive quand même à distinguer l'indicateur de rapport qui est sur 'N'
Petit moment de calme et de réflexion : dans quoi me suis-je fourré ! Il va falloir assurer pour prendre du plaisir et ne rien casser ou faire de bêtises. Un encadrant passe pour un rappel des consignes, j'ai presque tout bon et il me rappelle de ne pas accélérer à fond avec le volant même un tant soit peu braqué.
Le mécano arrive pour démarrer le moteur ...
Il vérifie que la boite est sur 'N' puis enclenche le démarreur. Une chose me saute tout de suite aux ... tripes : le niveau de vibration ! Je vais devoir tenir 5 tours comme ça ! Je fais des signes à ma famille qui me filme aussi, j'agite les mains comme je peux pour indiquer que ça vibre. Tant que j'y suis je fais coucou aux 2 enfants qui me filment aussi.
Le mécano me dit de débrayer, puis il passe la première (pour se faire il faut maintenir le bouton "Gear" du volant et actionner la palette de droite de montée de rapport). On me dit que c'est bon, puis finalement non, passage au neutre, embrayage puis peu après c'est bon. Je relâche l'embrayage tout doucement et c'est parti !
La voiture broute comme c'est pas possible, je suis encore dans les stands avec d'autres voitures et des personnes, je n'ose pas trop accélérer. Je
passe la zone des stands et je mets un peu pus de gaz, ça broute toujours mais c'est mieux. Arrive le moment de rejoindre la piste. Comme
je suis le premier de ma session, pas de risque de percuter une autre voiture. Je regarde à droite, enfin j'essaye, comme tout à l'heure je ne
peux quasiment pas bouger la tête, je m'engage sur la piste. Je commence à tester la voiture, l’accélérateur sans aller à fond, la
direction très dure, les freins qui sont décevant, les palettes. Sur les virages qui suivent je continue l'apprentissage express, j'appuie plus
les quelques freinages et la puissance des freins commence à se montrer. Je suis bien les cônes, arrive la chicane passée avec des broutements
(c'est là que mon Boxster à serré), après cette chicane il y a une épingle peu serrée qui donne sur la ligne droite de 800m. Je suis bien
les cônes puis arrive le dernier cône synonyme de levée de toute restriction !! J'appuie à fond sur la pédale de droite. C'est un moment
fort qui arrive : je me sens soulevé vers l'arrière malgré le harnais très serré, le moteur commence à hurler dans les oreilles, les shifts
lights s'allument sur le volant, je passe un rapport qui s'enclenche avec douceur !?. La vitesse augmente, je sens le casque un peu aspiré
par le vent, les autre rapports suivent 5-6-7. Je vois les panneaux de la zone de freinage, ils semblent mis les uns sur les autres. Je me
concentre et je me dis que je vais garder une marge par rapport au 150m. Après tout je ne conduis cette monoplace que depuis seulement quelques
virages sans jamais avoir réellement freiné. Ca va quand même vite puisque la vidéo donne un freinage à un peu moins de 200 vers 180m.
J'écrase la pédale de frein. Curieusement je ne sens pas la décélération, je me souviens quand même sentir visuellement que ma tête
avance un peu par rapport à l'habitacle. Je freine fort jusqu'au panneau 100m puis je tombe 4 rapports et je soulage un peu le frein et je
braque à 50m pendant que la formule Renault biplace me dépasse. Je passe le virage tellement lentement que ça broute en 3. La ligne droite des
stands arrive pour un autre tour de manège. Cette fois il va falloir freiner à 100m, rétrograder à 50m et braquer très tard. C'est la fin du
premier tour. Ca va très vite, beaucoup d'infos à restituer, de concentration, du stress et les envies de bien faire et prendre du
plaisir. Bref les trajectoires sont brouillonnes et les rapports pas toujours bons. Je me fais dépasser par un autre stagiaire, pas grave. A
un moment je suis un autre très lent, coup de bol un moniteur l'arrête pour lui parler. A un moment je vois un stagiaire assez lent au 180
avant la ligne droite. Allez je vais essayer de me le faire. Je suis toujours lent dans le virage et il est assez loin. J'ai du accélérer plus tôt que lui car je vois que je rapproche tout en étant loin. Je me rapproche encore tout comme la zone de freinage. J'ai encore de la marge
mais elle réduit tandis que la vitesse de rapprochement augmente encore. Décision est prise de doubler, je me décale à sa droite et je le
dépasse avant le panneau 200m. YES !!! Je fais un freinage safe vers 170m sans fermer la porte. PUTAIN ! J'AI FAIT UN PUTAIN DE DÉPASSEMENT A
L'INTÉRIEUR AU FREINAGE ! Quel exploit ! J'enchaîne mes tours et je sens déjà que c'est épuisant ! Je profite quand même du manège à chaque
ligne droite jusqu'au drapeau à damier qui signifie dernier tour. Je vais essayer de freiner du plus fort que je peux mais la vidéo déconne à ce moment là.
Je rentre donc au stand en première avec toujours ce broutage infernal. Je me sens épuisé mais heureux d'avoir vécu ce moment et surtout de ne pas avoir de grosse bêtise.
Dès le moteur éteint je redescend sur terre dans un confort incroyable !! Plus de bruit ni de vibration. Je commence déjà à analyser et je me rend compte tout de suite d'une chose : je ne suis pas un pilote. Cette voiture est bien au-dessus de mes capacités tant techniques que physiques et mentales. Je redescends doucement, je viens vraiment de vivre un truc extra-ordinaire, je viens de toucher du doigt le pilotage d'une monoplace. Je pense que c'est la voiture la plus proche de la course auto réelle que je pourrai toucher. Je ne me vois absolument pas faire un tel stage en F1.
En y repensant j'ai une absence de sensation dans un domaine que pourtant j'ai pu expérimenter de manière différente : les 'G'. Ayant fait de la voltige je sais ce que c'est que d'encaisser jusqu'à 5G et -3.5G. La je n'ai aucun souvenir d'avoir ressenti ces accélérations. Ni au freinage qui doit être le plus élevé, ni à l'accélération, ni en latéral dans les virages. C'est comme si mon corps avait été intégré à la voiture les temps de ces 5 tours. Étrange !
Prochaine étape : recommencer !
Merci de m'avoir lu.
PS : veuillez excuser ma lenteur escargotesque dans les courbes